Premières approches

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Communiquer « Communiquer » vient du latin « communicare » signifiant « entrer en relation avec » et suggère l’idée d’une rencontre entre les personnes. Communiquer, c’est créer des ponts entre des mondes, des peuples, de groupes, des individus… Communiquer, c’est aussi transmettre des informations, et donc aider à la diffusion des connaissances, à l’éveil de l’esprit. Mais la communication est aussi perverse, car elle prend également le visage d’une société médiatique, envahissante et manipulatrice. Nous sommes entrés dans l’ère de la communication : depuis l’après guerre, essor considérable des médias audio-visuels, prolifération des outils de communication et la communication interpersonnelle s’inscrit dans le cadre d’une mutation des mœurs : celle du déclin de l’autorité traditionnelle (dans le couple, la famille, à l’école, en entreprise) au profit de pratiques qui laissent place à l’écoute, la négociation, la discussion, l’échange, bref à la « communication.


Les champs de la communication

A. Intra-personnel : communication avec soi même. Activités : Penser, raisonner, analyser, réfléchir. On se parle à soi-même, on apprend à se connaître soi-même et à se juger, on se persuade soi-même de ceci ou cela.

B. Interpersonnel : communication entre 2 personnes : Activités : Apprendre, échanger, influencer, aider, jouer. La communication interpersonnelle permet de dialoguer avec l’autre, de mieux le connaître et de mieux se connaître soi-même. C’est grâce à la communication interpersonnelle que l’on établit, maintient, mais quelquefois aussi détruit ou rétablit les relations humaines.

C. Petit groupe : communication à plusieurs. Activités : Échanger des informations, trouver des idées, résoudre des problèmes, aider. La communication en petits groupes permet d’échanger avec les autres. On y résout des problèmes, on y développe de nouvelles idées, on y partage des connaissances et les expériences. Une bonne part de la vie sociale se fait en groupe.

D. Public : communication d’un orateur à un auditoire. Activités : informer, persuader, divertir.

Communiquer, c’est faire quoi ?

Parce que communiquer, c’est faire plein d’autres choses que « simplement » transmettre une information, les Canadiens de Com, vous dites ?, ont produit une introduction vidéo bien dense, mais simpa et pas longue (12 min 34) :


Schéma de Jakobson

Jakobson a proposé un schéma de la communication qui a fait longtemps autorité. Certes, il faut qu’un prof ait conscience de ce modèle simple, mais c’est un peu juste aujourd’hui. Et surtout, ça n’est en rien un préalable didactique. Ce qui compte, c’est de faire expérimenter par les apprenants, c’est donc la pratique qui doit primer sur l’approche théorique.

A. Le schéma linéaire

Le premier modèle de la communication est élaboré dans les années 40 par les américains Shannon et Weaver. Ces chercheurs, qui travaillent à l’amélioration des transmissions téléphoniques, décrivent la communication comme un mécanisme cybernétique qui joue sur quatre entités distinctes : un émetteur et un récepteur reliés par un canal dans lequel circulent des messages. Ce schéma ne s’intéresse pas à la signification du message, mais à sa seule transmission mécanique.

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B. La prise en compte de la rétro-action (feed back) Les critiques vont très vite porter sur la linéarité de ce modèle qui n’intègre pas les retours inhérents à toute communication et les interactions qui se produisent. D’autres chercheurs, Laswell en particulier en 1948, vont introduire un modèle plus interactif qui pose la communication comme un échange bidirectionnel, modèle s’apparentant à un match de ping pong et jouant sur la réactivité des partenaires.

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C. L’apport de Jakobson En 1963, Roman Jakobson (linguiste structuraliste russe) propose une nouvelle approche : communiquer, selon lui, c’est mettre en relation un émetteur et un récepteur dans un contexte donné et après un commun accord (contact). Le message qui les relie n’est autre que la langue, faites de mots structurés selon une grammaire connue des deux interlocuteurs : le code. Dans son approche, Jakobson intègre six fonctions qu’il attribue au langage :

  • La fonction référentielle (ou dénotative) : le langage permet de donner des informations (fonction aussi dénommée sémiotique ou symbolique) ;
  • La fonction émotive ou expressive (centrée sur l’émetteur) : le langage permet d’exprimer des intentions et des désirs ;
  • La fonction conative (centrée sur le récepteur) : le message vise à produire un effet sur l’interlocuteur
  • La fonction poétique : le message acquiert une valeur propre, par ses qualités esthétiques ;
  • La fonction phatique (centrée sur le canal) : le langage permet d’établir, prolonger ou interrompre un communication (par exemple « allo ! ») ;
  • La fonction métalinguistique (qui fait référence au code lui-même) : le langage permet de parler de lui-même (par exemple : « autrement dit… »).

Selon Jakobson, ces six éléments ou facteurs de la communication sont nécessaires pour qu’il y ait communication. Pour autant, l’usage du schéma en cours communication interpersonnelle est problématique en ce sens que, s’il permet de repérer les sources de bruit pouvant provoquer un malentendu, il n’en reste pas moins que ce schéma ne suffit pas à rendre compte de ce que la communication interpersonnelle a de spécifique.


Repenser le schéma

Déconstruire le schéma de Jakobson ?

Il n’est évidemment pas interdit d’utiliser le schéma de Jakobson, au contraire, puisque les élèves l’ont déjà exploité dans leur parcours antérieur.

1. Le schéma de Jakobson est généralement présenté comme étant LE schéma de la communication.

  • C’est un modèle mécaniste qui se réfère à la théorie de l’information (cybernétique). Jakobson partait du principe suivant : « Il n’y a aucune opposition fondamentale entre les problèmes que rencontrent nos ingénieurs dans la mesure de la communication et les problèmes de nos philologues ». C’est pourquoi le modèle de l’information inspiré des télécoms devient le modèle de la communication interpersonnelle.
  • Il conviendrait d’abord de s’entendre sur ce qu’on nomme « message »:

Linguistique. Séquence de signaux, correspondant à des règles de combinaisons précises, envoyée par un émetteur vers un récepteur par l’intermédiaire d’un canal. (Dictionnaire TLFI)

2. En linguistique, l’information contenue dans la « séquence de signaux » se confond avec la signification du message.

D’où viennent alors les problèmes d’incommunication ? Les « bruits » peuvent non seulement affecter le canal, comme indiqué par Jakobson, mais aussi les phases de « codage » et « décodage » du message (c’est la notion de « bruits sémantiques » apportée par les cogniticiens).

Il faudrait donc que le schéma intègre les différents niveaux de bruits qui perturbent l’élaboration et la transmission du message, la réception,… mais alors ce serait sans compter les aspects relationnels qui ne pourraient trouver leur place que comme bruits supplémentaires !

3. Codage et décodage : le schéma est imprégné du modèle du déchiffrage du code morse. Ainsi, quand on affirme que « communiquer, c’est coder et décoder des messages », deux questions se posent :

  • Comment expliquer que l’émetteur ne sait pas toujours comment finir la phrase qu’il a commencée ? Si le message est le résultat d’un codage, de quoi est-il la traduction ? qu’est-ce qui a été codé ? des informations codées en format non linguistiques ? des informations « inconscientes » ?
  • En fait, le codage impliquerait l’idée d’un programme de cryptage avançant étape par étape : mais quand je m’exprime, je « rature », j’anticipe les interprétations, je modifie en retour… Autrement dit, interprétation ou génération du message sont des pratiques différentes, mais qui mettent en jeu des processus analogues.

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La phrase « C’est réussi ! » véhicule l’idée de « résultat favorable ». Pourtant, prononcée dans certaines circonstances et avec une intonation particulière, le sens littéral de « réussite » disparaît totalement au profit de la « signification » exactement contraire de « revers » ou d’« échec » : c’est réussi ! . La métaphore du codage réduit la langue à un code, et les signes à des signifiants. Or, un message décodé (décrypté) n’est pas pour autant interprété : non seulement toute communication relève de plusieurs codes, mais les messages peuvent aussi créer des codes (les usages font évoluer les langages, la création poétique joue sur les codes…).

La phrase « C’est réussi » pose ainsi la question de la situation de communication.

 

4. Supposons que l’on inverse les personnes A et B : la communication (donc, pour Jakobson, l’information codée dans le message) sera-t-elle la même ?

Quand on parle d’ « émetteur » et de « récepteur », on a simplement oublié qu’on parlait, dans le modèle initial, d’appareillages téléphoniques ! Ceux-ci sont ainsi promus en personnes ! Et inversement, les personnes sont dépréciées en machines. Si A changeait de rôle avec B, la situation de communication et le message seraient forcément différents… (statut, rôle de chacun dans la situation, compétences communicationnelles…)

Le message diffère pour l’émetteur et le récepteur : il n’est pas perçu de la même façon, car la différence des intentions entraîne la différence des perceptions. Dans ce schéma, le sens de l’échange est d’ailleurs désocialisé, comme s’il existait indépendamment de A et de B : alors que le sens, c’est ce qui se construit entre A et B, dans le temps de l’échange. Ainsi donc, il faut faire son deuil de l’idée selon laquelle c’est l’émetteur qui détient le sens… :

Il n’y a pas de vrai sens d’un texte. Pas d’autorité de l’auteur. Quoi qu’il ait voulu dire, il a écrit ce qu’il a écrit. Une fois publié, un texte est comme un appareil dont chacun peut se servir à sa guise selon ses moyens, il n’est pas sûr que le constructeur en use mieux qu’un autre. »

Paul Valéry

Le « récepteur » est en effet en activité constante : il donne du sens au message tout autant qu’il en reçoit. Il n’est donc pas qu’un récepteur puisqu’il participe à la création du sens.

Le temps de la communication, dans ce modèle, ne s’inscrit dans aucune histoire : il n’y a ni passé ni futur. Tout acte de parole a pourtant lieu dans un contexte défini par des données spatio-temporelles et socio-historiques.

5. Raisonnons par l’absurde : le schéma de Jakobson est pertinent pour rendre compte de la situation de communication suivante :

Je Émetteur
tape sur mon clavier Canal
la touche « A » Message en code linguistique
et l’écran affiche « A » Rétroaction

Il faut donc admettre ici que ce qui est échangé, ce n’est pas de la signification, mais du signifiant (qu’a compris l’ordinateur ?)

Conclusion : le modèle canonique de la communication est en réalité un schéma de transmission du signifiant, et ne rend compte de rien d’autre : le modèle ne dit rien de la parole, du sens, de la signification sociale de l’échange.


(d’après François Rastier, Césure n°8, 1995, Communication ou transmission ?)

 


Pour une approche systémique

 

L’activité communicationnelle est une interaction médiatisée par des symboles. Habermas

Il faut bien qu’un modèle de la communication interpersonnelle puisse rendre compte de la dialectique entre individu et société, entre niveaux micro et macro, entre des codes préexistants et les innovations dans les usages. Tout acte de parole est un événement dans lequel des langages se mettent en action, mais pour le comprendre, il ne suffit pas de montrer comment il puise dans des systèmes de signes, il faut également montrer sa place dans l’univers des relations sociales qui lient les hommes entre eux et au monde.

Décrire une pratique communicationnelle consiste à décrire comment des relations sociales sont en jeu : une pratique communicationnelle est pensée comme un usage de signes qui contribuent au maintien ou au changement des habitudes des interactants, et établissent ainsi le statut social de leurs relations.

Les dimensions suivantes déterminent une pratique communicationnelle :

  • espace et temps : toute énonciation s’inscrit dans un espace et dans un temps qui sont socialement définis. Elle a une durée et une étendue, est située par rapport au passé et à l’avenir, par rapport à un dedans et à un dehors. Elle reflète, mais altère aussi notre place dans l’histoire et dans la géographie.
  • institutions : une énonciation s’insère plus ou moins dans un cadre institutionnel. Une institution peut comporter des régularités plus ou moins précises pour les énonciations possibles dans un certain contexte.
  • rapports intersubjectifs : dans un acte de communication se confrontent au moins un énonciateur et au moins un énonciataire. Toute pratique communicationnelle comporte d’autres répartitions des rôles et des pouvoirs entre les interactants. Watzlawick distingue des rapports symétriques caractérisés par une minimisation de la différence et des rapports complémentaires où l’interaction est basée sur une maximisation de la différence entre les interactants. Ducrot utilise le concept de « transformation juridique » pour décrire comment un acte de langage modifie les rapports interpersonnels. Dans un acte de langage il faut également tenir compte de la différence, montrée par Ducrot, entre destinataire(s) et auditeur(s). Le premier est la personne à qui l’acte illocutoire s’adresse directement, le second n’est qu’un témoin (dont le rôle peut pourtant être très important). Leurs rôles peuvent varier d’une pratique communicationnelle à l’autre. C’est surtout la différence entre privé et public qui est opératoire d’une manière très variable.
  • compétences : toute pratique communicationnelle présuppose plusieurs compétences de la part des interactants: ils doivent maîtriser le système de signes utilisé (c’est ici la compétence linguistique dont parle Chomsky). Mais il y a une compétence proprement communicationnelle qui consiste à comprendre quand, où, avec qui et comment communiquer. Carontini montre que cette compétence implique, surtout dans des situations qui ne sont pas institutionnellement définies, des « processus inférentiels multiples, souvent complexes et difficiles. »
  • savoirs : les énonciations ne présupposent pas seulement des compétences, elles permettent de produire et de diffuser de nouvelles connaissances. Mais dans chaque pratique de communication, cette créativité trouve d’autres espaces de manoeuvre et implique toujours une certaine redondance et une reprise du déjà connu. Ici, il faut aussi penser aux règles de pertinence qui spécifient dans quel contexte une information constitue une nouvelle connaissance.

Évidemment ces cinq dimensions ne sont séparables que pour des fins analytiques. Elles sont éminemment imbriquées les unes dans les autres.


D’après une synthèse de Totschnig, Éléments pour une théorie pragmatique de la communication, 2000.

 


Un schéma qui met en évidence la complexité de l’interaction

 

Télécharger le schéma complet en pdf

Commentaires :

  • Très forte interpénétration de Représentation et Formulation : mais la Représentation est spontanée, analogique, multidimensionnelle, la Formulation demande analyse et digitalisation, puisqu’elle suppose choix et contrôle des formes symboliques susceptibles de médiatiser l’interaction et de l’orienter vers une représentation commune [Incidente sur l’évaluation avec des élèves : ne pas confondre Représentation et Verbalisation. Ainsi, il ne faut pas imaginer qu’il y a recouvrement total entre la représentation que j’ai de l’arbre, et ma description de cet arbre, par le langage ou par le dessin : la symbolisation exige des compétences spécifiques.] La symbolisation est à la fois profondément subjective et hautement socialisée et normée.

Le langage, avec ses schèmes verbaux, grammaticaux, syntaxiques, institue une continuité et une symbolisation mutuelle entre le sens de ma pensée, le sens de ma parole, le sens de mon action (Ricoeur)

  • Référentiation et interprétation = reconstitution et évaluation de la représentation et de la formulation de l’émetteur.
  • Emmanuel Levinas définit l’ipséité (le moi-même, le toi-même), comme présentation de soi par soi dans le visage, en deçà de toute représentation de soi (manifestée dans l’autopositionnement).

Cette schématisation de la communication interpersonnelle est un document pour l’enseignant, pas pour les élèves. Mais il pourrait être judicieux d’utiliser la partie centrale en lieu et place du schéma de Jakobson (en BTS par exemple).


Effets de contexte

 

La communication se produit toujours à l’intérieur d’un cadre ou d’un environnement spécifique, un contexte particulier. Le contexte influence tant ce que l’on dit que la manière dont on le dit. Quatre aspects sont à prendre en compte :

  • Le contexte physique, environnement tangible et concret : nous ne communiquons pas de la même manière sur un terrain de foot et dans une église, et l’on peut dire que le contexte physique interfère de manière importante dans notre façon de communiquer.
  • Le contexte temporel, moment où la communication se réalise, mais aussi place du message dans une séquence d’évènements. Selon la nature des évènements passées ou celle de ceux qui doivent survenir par la suite, le climat de communication va être plus ou moins favorable…
  • Le contexte culturel, -styles de vie, croyances, valeurs, normes, protocoles sociaux et langagiers – qui influence largement et souvent inconsciemment nos comportements, manière de faire, de penser et d’agir.
    • Les valeurs fournissent aux membres d’une culture donnée des points de repère moraux pour apprécier les êtres et les situations. Elles sont interdépendantes, formant un système que l’on dénomme ethos, et s’ordonnent généralement selon une certaine hiérarchie « ‘échelle des valeurs » (mais elles peuvent parfois entrer en contradiction les unes avec les autres ; il y a alors conflit de valeurs).
    • Les normes s’appuient sur des sanctions positives ou négatives pour réguler la vie sociale. Leur caractère contraignant et leur degré de généralité sont très variables. Certaines sont impératives et peuvent être codifiées dans des textes de lois ; d’autres ont simplement un caractère coutumier ou fonctionnel. Certaines sont universelles et s’appliquent à tous les membres d’une société, d’autres ont un caractère local et différent selon la place qu’occupent les individus à l’intérieur d’une société.

En fait tout l’héritage culturel interfère dans notre manière de communiquer, de construire les échanges avec autrui.

Les individus appartenant à des cultures différentes non seulement parlent des langues différentes mais, ce qui est sans doute le plus important, habitent des mondes sensoriels différents.

E. T. Hall , Seuil 1971, La dimension cachée

  • Le contexte socio-psychologique -relation de rôle entre les participants (on ne communique pas de la même façon avec son patron, sa femme, sa mère…). L’état d’esprit (ou prédisposition générale psychologique envers quelque chose) induit une attitude qui oriente dans un certain sens toutes les interactions en question. Ces attitudes (corporelles, verbales…) qui peuvent être variées définissent le rôle tenu par le sujet.

Ce mot est entaché, dans notre langue, d’une signification qui lui vient du théâtre et du cinéma. Dans ce sens, il évoque un « masque » par lequel nous prenons des attitudes composées pour incarner un personnage distinct de notre personnalité. Il est vrai qu’en groupe, même si nos comportements nous semblent spontanés, nous n’échappons pas aux rôles. Et ce n’est pas l’individu lui même qui décide de son rôle car il convient de distinguer le rôle qu’il a décidé de jouer à l’avance, le rôle qu’il croit jouer, le rôle que les autres attendaient de lui, le rôle qu’ils lui imputent, le rôle qu’il a effectivement joué… Ces rôles ne sont pas forcément les mêmes et ne sont pas forcément concordants.

Roger Mucchielli, La dynamique des groupes ESF

Pour l’école de Palo Alto, tous nos messages contiennent une demande de « validation de soi ». Nous recherchons non seulement la confirmation de l’image que nous avons de nous même, mais aussi l’attestation de notre vision des autres et de notre expérimentation du monde qui nous entoure. Certains dysfonctionnements relationnels sont dus à l’écart entre l’image que l’on a de soi et celle que nous renvoie l’autre. Erwing Goffman utilise une métaphore dramaturgique pour parler des interactions. Pour lui,

la vie sociale peut être comparée à une scène où des acteurs se donnent en représentation et interprètent des rôles en accord avec la situation.

E. Marc Sciences Humaines N° 4

Dans cette perspective, la relation se baserait sur une prise de rôles successifs, des évaluations, des adaptations et des ajustements permanents.. Le rôle est ce par quoi nous nous exprimons et nous nous prolongeons jusqu’à l’autre, mais encore faut-il que nous ne nous enfermions pas dans des rôles figés en décalage avec la situation de communication. Le but étant que

l’individu, dans le cadre des règles du jeu auxquelles il se prête, puisse développer un système de valeurs et de règles de conduite authentiquement personnelles et une image de soi qui soit bien sienne.

PERRON Les Représentations de soi .

Pour Alex Mucchielli, un rôle est un ensemble de conduites repérables. Ces conduites, dans les diverses situations où elles sont mises en œuvre, sont sous-tendues par un petit nombre d’attitudes. L’ensemble des conduites, comme celui des attitudes, forme un tout cohérent si on le rapporte à une finalité présumée ou à un principe organisateur latent de ces conduites ou de ces attitudes (règle ou norme implicite du rôle). (La Psychologie Sociale, Hachette Supérieur).


Palo Alto

 

C’est autour du Mental Research Institute (MRI) en 1959 que s’est fait le regroupement de savants systémiciens de disciplines différentes mais axant leurs recherches sur la communication : ethno-anthropologie, psychiatrie, psychologie, neurologie, éthologie… Ils s’appellent G. Bateson, Don D. Jackson, P. Watzlawick, E.T Hall…

L’École de Palo Alto propose un autre modèle jouant sur la métaphore de l’orchestre de jazz :

Ce modèle de la communication n’est pas fondé sur l’image du téléphone ou du ping-pong – un émetteur envoie un message à un récepteur qui devient à son tour émetteur – mais sur la métaphore de l’orchestre… Mais dans ce vaste orchestre culturel, il n’y a ni chef ni partition. Chacun joue en s’accordant sur l’autre…

Bateson, Birdwhistell , Gofman, Hall, Scheflen, Sigman, Watzlawick.La nouvelle communication , Seuil, 1967

Dans un tel modèle, l’accent n’est pas mis d’abord sur les acteurs de la communication (émetteur et destinataire, car ils se trouvent en perpétuelle interaction et ne peuvent être isolés), ni sur le message communiqué (car largement insaisissable tant dans sa forme que dans son contenu) mais sur l’ensemble du système compris comme un réseau indissociable de relations (principe de globalité systémique).

Tout homme, en venant au monde se trouve ainsi pris dans ce réseau de relations tissé par la socio-culture. Sa situation est semblable à celle du nouveau musicien qui reçoit un instrument et à qui on demande de se joindre à l’improvisation. Pour lui, ne pas émettre de son, c’est encore jouer en produisant… un silence, silence qui sera aussitôt interprété et repris par les autres musiciens…De tels comportements influencent les autres et les autres, en retour, ne peuvent pas ne pas réagir à ces communications, et de ce fait, eux-mêmes communiquer…

…On ne peut pas ne pas communiquer.

Watzlawick, Beavin, Jackson, Une logique de la communication, Seuil 1967,

.

Avec cette nouvelle approche, la communication ne peut être pensée que comme un système particulièrement complexe dans lequel chaque élément a son importance – éducation, expérience vécue, contexte, perception, système de représentations, système d’interprétation… et dans lequel l’aspect relationnel qui s’installe dépasse largement le seul contenu exprimé.

Toute communication présente deux aspects : le contenu – c’est à dire l’information échangée – et la relation, tel que le second englobe le premier et, par la suite, est une méta communication. (id.)

Avec l’approche définie par les chercheurs de l’École de Palo Alto, ce qui est important dans la communication, ce n’est pas le message échangé mais la relation qui se noue entre les protagonistes engagés dans cette communication.

C’est mon intuition personnelle qu’un cinquième, peut-être, de toute communication humaine sert à l’échange de l’information, tandis que le reste est dévolu à l’interminable processus de définition, confirmation, rejet et redéfinition de la nature de nos relations avec les autres » (id).

Cette approche privilégie la causalité circulaire, l’inter influence des individus pris dans une situation de communication : elle abandonne l’idée d’un récepteur passif pour celle d’un partenaire actif qui renvoie constamment à l’émetteur des messages en feed-back, portant sur l’effet que produit sur lui les discours de l’émetteur. E. Marc Sciences Humaines N° 4 de 1991.

Cette conception de la communication, qui sert aujourd’hui de base sur laquelle on construit les compétences communicationnelles, s’appuie donc sur l’idée d’interaction, cette « relation interpersonnelle entre deux individus au moins par laquelle les comportements de ces individus sont soumis à une influence réciproque, chaque individu modifiant son comportement en fonction des réactions de l’autre.

Marc et Picard 1996


Paramètres

 

La distance entre les interactants ou proxémie

L’homme occidental a organisé ses activités et relations sociales selon un ensemble de distances déterminé auquel il a ensuite ajouté les notions de personnage public et de rapports publics… Ainsi, pour eux, il est implicitement obligatoire de traiter les étrangers selon certains modes déterminés. D’où l’existence des quatre catégories principales de rapports inter-individuels – intime, personnel, social, public – et des activités et espaces qui leur sont liés.

Edward T. Hall, Seuil, 1971, La dimension cachée

  • Distance intime (jusqu’à 50 cm dans notre culture). Distance de l’amour et du corps à corps. Lorsque cette proximité a lieu sans que ce soit souhaité (exemple lorsque l’on est dans une file d’attente, les gens sont gênés)
  • Distance personnelle (jusqu’à 1m20) : c’est espace des relations amicales, la distance des relations courantes
  • Distance sociale (jusqu’à 3m60) : le contact corporel n’est plus possible. C’est l’espace des relations plus impersonnelles. (Réunion informelle, cours de récréation…)
  • Distance publique : c’est la distance par exemple entre un homme politique ou un comédien et son public.

Les paramètres du système corporel

Au-delà des mots, tout un ensemble participe à la construction du sens dans l’acte de communiquer : gestes, mimiques, postures, regard, apparence, dynamisme… tout le domaine du « non verbal » dont l’importance n’est plus à démontrer…ne serait-ce que parce qu’on estime que quand nous nous exprimons, 65% de nos messages sont non verbaux et 35% sont verbaux.

Autant d’éléments qui participent de notre communication et qui peuvent soit appuyer, soit amplifier, soit parasiter le discours émis…

  • Gestes illustratifs : centrés sur le référent (ce dont on parle) :
    • kinémimiques : miment la situation décrite oralement,
    • spaciographiques : donnent une représentation schématisée de la disposition dans l’espace,
    • pictomimiques : dessinent la personne ou l’objet dont on parle,
    • déictiques : désignent l’objet dont on parle.
  • Gestes expressifs : par exemple mimiques faciales qui reflètent le sentiment de l’émetteur, qui indiquent comment interpréter ce qu’il dit ou crispation de parties du corps…
  • Gestes quasi-linguistiques : se substituent au langage oral : il s’agit en fait d’un véritable langage gesticulé, variable avec les cultures.
  • Gestes paraverbaux accompagnent le discours par des figures abstraites de la main par exemple.
  • Gestes phonogènes : liés à l’articulation et mouvement de la bouche.

Mais aussi des gestes qui servent à maintenir le contact…

  • Gestes phatiques : centrés sur l’interaction : l’émetteur. Maintien de l’interaction entre les personnes : regard, contacts…
  • Gestes régulateurs centrés sur l’interaction : le récepteur. Ensemble des gestes de la rétroaction

Et d’autres gestes qui peuvent paraître indépendants de la communication, au moins en apparence…

  • Gestes autocentrés (se gratter, croiser les mains…)
  • Gestes ludiques : manipulation d’objets qui peuvent révéler une certaine nervosité par exemple
  • Gestes de confort : changement de position par exemple

Les paramètres du système paraverbal

  • Le placement de la voix : une bonne qualité de la voix dépend de l’équilibre réalisé entre les 3 résonateurs que sont le pharynx, la bouche et le nez
  • L’accentuation est le fait d’insister sur une syllabe ou un mot que l’on veut mettre en valeur par exemple
  • L’intonation c’est le fait de changer la hauteur de sa voix,
  • La diction est l’art de dire : articulation + prononciation,
  • Le volume est l’amplitude du son, elle se mesure en décibels,
  • La hauteur est le son plus ou moins aigu ou grave,
  • Le timbre est la couleur de notre voix,
  • Le débit est la vitesse plus ou moins grande d’émission des mots. Varier les changements de vitesse permet de retenir l’attention de l’auditeur.
  • La modulation est la variation de la hauteur du son,
  • Le rythme est la façon de développer les parties de la phrase parlée
  • Les pauses et les silences qui sont des sortes de ponctuations orales qui permettent quand ils sont bien maîtrisés de retenir ou attirer une attention défaillante.
  • La respiration : pour éviter les blocages et le « trou noir » dus au stress et au trac, il est nécessaire de bien respirer pour oxygéner régulièrement le cerveau.

Les paramètres du système langagier

Un locuteur qui émet une phrase dans un contexte donné fait simultanément 3 choses :

  • Il produit un énoncé de la langue : une forme grammaticale qui a une signification ; c’est la fonction locutoire.
  • En disant ce qu’il dit, il accomplit au moins une action, c’est la fonction illocutoire.
  • Enfin il induit certains effets sur son auditeur ; c’est la fonction perlocutoire.

Si la communication langagière est apparemment la plus explicite, elle comporte une part d’implicite particulièrement importante. Ainsi derrière chaque notion, derrière chaque mot qu’on emploie, se cachent des représentations personnelles.


Conte hindou.

Trois hindous vivaient au pays où l’éléphant est la principale bête de somme. Ces trois hommes, aveugles de naissance, n’avaient donc jamais vu un éléphant. Un jour, ils se mirent à se demander à quoi ressemblait un éléphant. Décidés à satisfaire leur curiosité, ils se dirigèrent vers la grand-route et marchèrent jusqu’à ce qu’ils rencontrent un éléphant.

Il arriva que le premier plaça sa main sur l’immense flan de la bête ; le second, cherchant de la main, toucha la trompe de l’éléphant, alors que le troisième attrapa la queue de l’animal.

En revenant, un des aveugles dit à ses compagnons : « A ma grande surprise, un éléphant, c’est comme un grand mur lisse. « Tu fais erreur, dit le second, c’est plutôt comme un tronc d’arbre. « Mais non, dit le troisième, vous êtes tous les deux dans l’erreur. J’ai constaté qu’un éléphant, c’est comme un bout de câble »

Chacun de ces hommes s’était fait une idée très limitée d’un éléphant. S’il avait simplement pu tenir dans ses mains une sculpture miniature d’un éléphant et en palper la forme du bout des doigts, il se serait mieux représenté la forme d’un éléphant. Mais, même alors, aucun des 3 aveugles n’aurait pu en concevoir le volume.


Soi

 

Notre approche du monde et des autres : le filtre des représentations mentales et sociales

L’arbre que je dis ‘est pas l’arbre que je vois, l’arbre se situe bien au delà de son nom, réalité feuillue et ligneuse, impénétrable, intouchable, réalité au delà des signes, immergée en soi, plantée en sa propre réalité. Je peux la toucher, mais je ne peux la dire. Je peux l’incendier, mais si je la dis, je la dissipe. L’arbre qui est là-bas parmi les arbres n’est pas l’arbre que je dis mais une réalité au-delà des noms, au delà du mot réalité, c’est la réalité telle qu’elle, l’abolition des différences et l’abolition des ressemblances…

Octavio Paz Le Singe Grammairien.

Notre rapport au monde, donc aux autres, se construit sur la bases des représentations mentales et sociales qui donnent sens et validité à ce que nous percevons. En psychologie, la représentation est définie comme un ensemble de connaissances ou de croyances, encodées en mémoire. Les représentations ne sont pas seulement de petites étiquettes mentales qui nous servent à décrypter notre environnement, mais on les utilise pour communiquer avec autrui, pour imaginer, planifier et orienter nos conduites. L’enracinement psychologique profond des représentations mentales est lié à la formation des schèmes de perception et de comportement acquis tôt dans l’enfance (voir les travaux de Jean Piaget) ou encore à des « formes » (Gestalt) impliquées dans notre système perceptif.

Nous avons toujours besoin de savoir à quoi nous en tenir avec le monde qui nous entoure. Il faut bien s’y ajuster, s’y conduire, le maîtriser physiquement ou intellectuellement, identifier et résoudre les problèmes qu’il pose. C’est pourquoi nous fabriquons des représentations… Ce monde nous le partageons avec les autres, nous nous appuyons sur eux, parfois dans la convergence , parfois dans le conflit, pour le comprendre, le gérer ou l’affronter. C’est pourquoi les représentations sont sociales et si importantes dans ma vie courante. Elles nous guident dans la façon de nommer et définir ensemble les différents aspects de notre réalité, dans la façon de les interpréter, prendre une position à leur égard et la défendre. D. Jodelet -sous la direction de-, PUF 1989, Les représentations sociales

Les représentations doivent donc être considérées comme des systèmes mentaux de référence qui vont permettre à l’individu d’interpréter les évènements extérieurs et donc d’influer très fortement sur les constructions qu’il se fait du réel. Outre le cadre idéologique, le cadre culturel et le cadre social vont aussi prendre une importance particulière dans l’élaboration des représentations. Jean Claude Abric (PUF 1989 Les représentations sociales) précise qu’elles posent que le sujet ou le groupe aborde et évolue dans des situations qui lui sont proposées avec tout un ensemble d’a priori, de systèmes de pensées préétablies, de schèmes interprétatifs . Par là même, l’individu ne réagit qu’à une réalité représentée, sa propre réalité, appropriée, structurée, interprétée, et les comportements qu’il adopte ne sont jamais déterminés par les caractéristiques objectives des situations auxquelles il est confronté, mais par les représentations qu’il en a…

Mieux communiquer, c’est d’abord réfléchir à soi

Pour améliorer ma communication, toute démarche de changement introduira aussi une interrogation sur ma relation à moi-même. Dans ce questionnement, la première étape, jamais terminée, consistera à reconnaître ce que j’éprouve, ce que je ressens au moment où je le vis. Plaisir ou déplaisir, tristesse, colère ou joie, bonheur, amour ou désespoir. Tout cela n’est pas aussi facile à identifier qu’on ne le pense puisque nous avons appris à cacher, à censurer nos sentiments, nos émotions. Reconnaître mes sentiments réels, c’est me donner les moyens d’être plus cohérent dans mes conduites, dans mon positionnement à autrui. Jacques Salomé

Toute réflexion sur notre manière de communiquer avec les autres doit passer par l’exploration de l’agent principal de ce processus, c’est à dire soi-même. Qui sommes nous, sur quelles bases fonctionnons-nous, quels sont nos besoins, nos valeurs, comment les autres nous voient-ils, quels rôles jouons nous devant eux… ? Questions fondamentales, parce que notre façon d’y répondre détermine nos actions, nos comportements, la manière de réagir aux réactions, mots ou attitudes des autres. De ce fait nous seuls pouvons faire quelque chose pour notre communication – ce n’est pas l’autre que l’on va changer, mais c’est bien sur soi que l’on doit travailler.

L’image que nous avons de nous, celle que nous avons construite patiemment, résulte en fait de la façon dont nous imaginons que les autres nous voient : le concept de soi n’est en fait que le reflet de ce que nous imaginons être la perception des autres, et chaque expérience peut nous remettre en cause…

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Pas à pas nous construisons notre rapport au monde et aux autres et nous incorporons en quelque sorte les rôles que nous imaginons que les autres attendent de nous dans les différentes situations de la vie. Plus notre capacité d’imaginer augmente, plus les situations deviennent complexes, plus nous adoptons un comportement personnel en fonction des personnes en général.

Si nous pensons à nous en termes plutôt positifs, nous pourrons avoir tendance à nous imaginer que les autres nous perçoivent de façon positive. A l’inverse, si nous nous percevons plutôt en termes négatifs, nous risquons d’anticiper des réactions négatives de leur part. Dans les deux cas, nous agissons selon la façon dont nous pensons que les autres nous voient, et non selon la façon dont ils nous voient effectivement.

Chaque personne que nous rencontrons et chaque expérience que nous vivons confirment jusqu’à un certain point notre vision du monde mais peut aussi la faire évoluer, la faire changer.

Aussi, si l’idée que l’on a de soi est une des données importantes de notre communication, il est nécessaire, si on veut améliorer notre manière d’agir avec les autres, de mieux la cerner et l’analyser.

Un des outils servant à cette analyse est une division métaphorique du soi en quatre portions : la fenêtre de Johari (du nom des ses inventeurs Joseph Luft et Harry Ingham).

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Divisée en quatre portions ou carreaux, la fenêtre représente différents aspects ou composantes du soi. Celles-ci ne sont pas séparées l’une de l’autre, elles sont au contraire interdépendantes. Si l’une domine, les autres s’estompent plus ou moins.

  • Le « soi dévoilé » renvoie à toutes les informations, tous les comportements, toutes les attitudes et tous les sentiments personnels connus de soi et d’autrui : c’est le soi public (couleur de la peau, sexe, certaines idées, convictions…) La proportion de soi dévoilé varie selon la personnalité et les personnes fréquentées. On se montre ouvert avec certaines personnes et fermé avec d’autres et notre communication en résulte directement.
  • Le « soi aveugle » renvoie à ce que les autres savent de nous et que nous mêmes ignorons. Il peut s’agir de mots parasites ou de gestes, de mimiques que l’on fait de manière inconsciente. Le soi aveugle inclut aussi toutes les expériences passées que l’on a pu oublier mais qui participent à l’image que les autres ont de moi. Les aspects aveugles peuvent entraver la communication d’où l’importance parfois de réduire cette part de soi.
  • Le « soi caché » renvoie à tout ce que je sais de moi et que je ne veux pas révéler. C’est le jardin secret que je me suis construit…
  • Le « soi inconnu » renvoie à ces aspects de nous mêmes, inconnus de nous et d’autrui. Informations enfouies dans notre subconscient ou ayant d’une manière ou d’une autre échappé à la conscience, elles influent cependant sur nos actions…

Ces fenêtres sont particulièrement sujettes à variation…

  • elles varient d’une relation à l’autre,
  • elles peuvent varier d’une fois à l’autre dans une même relation,
  • elles varient en raison des changements qui s’opèrent en nous ou chez l’autre,

et il est intéressant d’être attentif à leurs fluctuations et de veiller à ce que chaque fenêtre convienne à la relation pour laquelle elle était conçue au départ…

Mieux communiquer, c’est cerner et s’appuyer sur ce qui favorise la communication

Chaque situation de communication est toujours une expérience nouvelle, un moment qui peut satisfaire ou décevoir, un moment ou la relation s’instaure, hoquette ou n’arrive pas du tout à s’instaurer. Il est donc important de savoir reconnaître et apprécier les sentiments réels éprouvés alors en dégageant avant tout les aspects positifs de la communication. En effet, l’école et plus particulièrement les expériences de communication réalisées alors (exposé, présentation de projet…) a, dans beaucoup de cas, imposé une approche par la négative : « ce n’est pas bien, il ne faut pas faire comme cela, tu lis trop tes notes, ta logique n’est pas bonne… » amplifiant souvent les blocages classiques que pouvait avoir la personne. Aussi, intégrer une démarche d’apprentissage ou d’amélioration de la communication nécessite de penser différemment et doit permettre qu’une meilleure confiance en soi renaisse. C’est pourquoi il est important de réfléchir à ce qui favorise la communication, à ce qui peut être pensé en termes positifs.

En se donnant les moyens de mieux se connaître dans la relation à l’autre, en réfléchissant à ce qui favorise chez soi la communication, ce qui met à l’aise, en sachant jouer et amplifier ces aspects positifs, on ne peut que gagner en assurance et en confiance en soi et faire que communiquer ne soit plus une contrainte mais un réel plaisir partagé. C’est sans doute un des enjeux les plus importants d’une formation à la communication.

Mieux communiquer, c’est trouver un rapport équilibré avec les autres

Si cerner au mieux l’image que l’on a de soi est particulièrement important dans une démarche d’amélioration de notre communication, penser la nature de notre rapport aux autres est aussi intéressant car pouvant donner un autre éclairage de nos processus de communication.

Écouter pour « entendre l’autre » relève d’une double attitude : l’attitude réceptive et l’attitude perceptive. Celles-ci vont d’une manière naturelle se décomposer (avec de multiples interférences) en six attitudes types selon la classification de Porter et de Rogers, qui chacune peuvent porter à interprétation, et donc provoquer une attitude en retour …

  • attitude d’évaluation : donne lieu à des jugements sur le comportement d’autrui, fait référence à des normes, des valeurs ; « vous avez raison de vous interroger, c’est grave et il est bien que vous en ayez pris conscience » ; ce type d’attitude peut induire culpabilité, dépendance ou révolte
  • attitude de décision : comme la précédente, l’individu se pose dans une attitude de non écoute car il impose à l’autre une solution toute prête, un schéma de pensée, un système de valeurs, « je vous conseille de… à votre place je… »…
  • attitude d’interprétation : vise à fournir à autrui, en fonction de notre compétence ou connaissance du problème, une explication susceptible de l’éclairer dans son comportement ; cette attitude peut être clarificatrice pour l’autre ou générer un rejet radical si elle vient trop vite…
  • attitude de soutien (que Rogers appelle rassurante) : elle vise à vouloir diminuer l’intensité du problème qui se pose à l’interlocuteur « les sentiments que vous éprouvez sont fréquents… il est trop tôt pour juger… »
  • attitude d’enquête : consiste à solliciter des informations supplémentaires « j’aimerais connaître vos… pouvez vous me préciser…
  • attitude de compréhension : se montrer « bienveillant », « tolérant » ; seule attitude permettant de prendre en considération autrui. Cette attitude, qui joue sur l’empathie, s’appuie sur une position d’écoute active qui permet à l’autre de dire et de se dire et ainsi favorise les conditions d’un réel processus de communication. Dans ce type d’attitude, on va montrer à autrui qu’il est entendu et on pourra jouer sur la reformulation des sentiments recueillis afin de montrer à autrui qu’il est entendu…

De l’attitude qui sera globalement privilégiée va dépendre la qualité de la communication et les possibilités d’échanges. Chacun utilise les différentes attitudes répertoriées. Cependant, seule une attitude de compréhension jouant sur une position d’écoute active peut permettre qu’une réelle relation s’installe, qu’une communication vraie s’engage. Par là peut s’installer une logique gagnant-gagnant ou adulte-adulte (cf. l’analyse transactionnelle).

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