Animation, engagement, image de soi

L’animation est le lieu par excellence pour que les jeunes les plus avancés dans une pratique au sein d’un atelier prennent assurance et responsabilité.

On objectera que les temps sont plutôt au renouvellement de l’offre d’animation en cours d’année qu’au maintien d’une même activité d’année en année ; qu’à cela ne tienne : il n’est pas nécessaire que l’activité soit ainsi pérennisée pour que les possibilité d’investissement (et de « promotion personnelle ») soient pleinement ouvertes.

Car l’animation est peut-être avant tout un espace de construction personnelle, en termes d’engagement et d’image de soi – ou encore de confiance en soi.

Animation et engagement

Dans nos EPL, ici telle étudiante de BTS a pu devenir leader d’un atelier manga et initier un club jeu vidéo, et là telle étudiant un atelier jeux de plateau. Des élèves de 3ème, 2nde, Bac pro, ont accueilli les propositions venant de ces « pairs reconnus comme plus avancés » avec peut-être plus d’enthousiasme que si l’encadrement avait été dévolu au seul enseignant d’ESC. Nos apprenants sont, de fait, porteurs de savoirs et savoir-faire utiles en animation et ils peuvent jouer un rôle décisif quant à coacher et motiver le plus jeunes.

Ces « grandes sœurs » et « grands frères » sont en capacité d’apporter aux équipes d’ESC des atouts bien utiles :

  • construire des projets, c’est-à-dire des histoires dans lesquelles les jeunes vont rentrer et qui les aideront à se projeter et à réussir dans ce qu’ils acceptent de tenter dans leur vie scolaire et périscolaire,
  • être stimulateurs, par leur présence et leur prestance, par du verbal et du non-verbal,
  • aider les jeunes à « découvrir leur vie », en découvrant à chaque étape qu’il est possible de faire mieux encore,
  • être moteurs dans des processus qui font levier.

Pour les jeunes, qu’ils soient ces accompagnants ou les accompagnés dans des animations, des ateliers, des clubs, etc., les enjeux sont multiples :

  • qu’ils participent vraiment activement à leurs activités et s’y engagent, et ce se faisant, ils dépassent la simple « participation passive »,
  • qu’ils oublient qu’ils sont dans un cadre scolaire (ou périscolaire),
  • qu’ils entrent eux-mêmes dans l’organisation et la préparation de leurs animations, avec plus de plaisir, plus d’engagement et plus de sens,
  • qu’ils intègrent une « casuistique de l’erreur » [expression de Bourdieu, Chamboredon & Passeron, dans Le métier de sociologue], leur permettant d’accepter qu’on puisse se tromper et que même si on n’aboutit pas à ce qui était prévu, l’inattendu auquel on doit faire face laisse quand même place à un aboutissement…

On est alors au cœur de la pédagogie de projet et de l’éducation populaire : pour les enseignants-éducateurs d’ESC, c’est clairement faire la proposition d’un temps de formation individuelle et collective et non pas d’un « atelier occupationnel ».

Engagement et image de soi

Lors d’une session du GAP ESC en Belgique, cette problématique des rapports entre l’engagement et l’image de soi (ou comme vecteur de confiance en soi) a été au cœur de la rencontre avec Sushi, animateur Breakdance à la Maison des jeunes de Cuesmes, près de Mons (auprès d’Henriette Junsgt, coordinatrice) [1].L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est gap-esc_fd-gris.jpg.

Sushi calque son animation sur les processus d’action et de réflexion qui lui ont permis de dépasser des aléas de sa propre vie.

Il résume sa proposition pédagogique dans une formule simple : être « Free style » dans son animation, c’est ouvrir la possibilité de partager avec les autres « la vie funky ».

Voici en quelques lignes le résumé de la manière dont Sushi schématise la vie et dont il conçoit son activité d’animateur  :

Que l’on ait ou pas des outils, tout démarre en fait d’une page blanche, dans l’animation comme dans la vie.

Ce qui compte, c’est de vivre différents cycles, accompagnés à chaque fois de chocs émotionnels… et il faut bien faire la part des choses dans les situations éducatives entre peur, dégoût, trauma, mauvaises surprises d’une part, et joie, contentement, heureuses surprises d’autre part… d’où la nécessité de rééquilibrer les ressentis, les affects : là j’ai un peu peur mais je sais pourquoi je le fais et j’accepte pour telle raison.

Or, quelque soit leur âge, tous les humains ont en eux la volonté d’être heureux (même à l’école), et aussi des expériences diverses, des passés et des choix différents. Et il y a moyen de valoriser cela.

Il faut donc développer une capacité d’auto-observation, de relecture et d’analyse, pour faciliter le dépassement des écueils psycho-affectifs puis la projection.

Selon Sushi, cela se joue entre deux pôles, RATIONNEL et ÉMOTIONNEL, tout en impliquant pour les jeunes plusieurs niveaux de vigilance :

  • CONSCIENCE (source de PAIX / SEUL)
  • INTENSITÉ (source de JOIE / SEUL OU ACCOMPAGNÉ)
  • VITESSE (source de PAIX / SEUL)
  • CONTRÔLE (source de PAIX / SEUL OU ACCOMPAGNÉ).

Et tout ça, dans la vie comme dans l’animation, passe par différents canaux : l’émotion, le partage, le silence, le non-verbal, l’expression artistique…

L’ANIMATION FREE-STYLE

Cela passe nécessairement par le fait de vivre des expériences dans l’intensité, et en ce sens, comme animateur (que l’on soit apprenant ou enseignant d’ESC) l’on gagne à surjouer l’attitude et l’expression, afin d’apprendre à utiliser l’offre et l’égo, le potentiel et l’excès, sans rancune. C’est un lieu idéal pour exprimer que « mon.ma prof / mon.ma patron.ne est fort terre-à-terre, et moi je suis céleste », comme le dit Sushi. Pour l’élève comme pour l’enseignant-animateur, là se joue une ouverture vers l’autre plus aisée à saisir et à s’approprier que dans le cadre des enseignements traditionnels (cours, TD…).

Qu’y gagne-t-on ?

  • développer la conscience et la volonté,
  • développer la capacité à ressentir et à se sentir soi,
  • donc développer le Soi et la confiance en soi, être en capacité de valoriser son image de soi,
  • et se donner des pages blanches nouvelles pour écrire son projet de vie,
  • tout en réparant la souffrance (cf. bouddhisme) face aux difficultés et imprévus de la vie.

LA VIE FUNKY

Sushi fait l’équation de « la vie funky » :

BONHEUR = ( ( EXPÉRIENCES +INFOS +ÉMOTIONS ) x CONTRÔLE ) / TEMPS.

Il voit dans l’animation et l’expérience artistique des voies propices à la mise en œuvre d’une vie funky, source de bonheur.

Quelques unes de ses phrases clés :

  • « Ta vie es destinée à rendre plus belle celle des autres en acceptant de partager les énergies. »
  • « L’esprit peut se reformater : c’est ça la page blanche. »
  • « On a de l’énergie, c’est comme l’électricité, c’est une force, pas une direction. »
  • « Chaque élève, chaque personne est quelqu’un et un miroir pour te découvrir. »
  • « Alors, c’est quoi ta page blanche ? »

Et tout ça, dit-il, parce qu’il a de l’amour à donner en vivant sa vie de façon funky.

ASSEZ DE BLA-BLA !

Sushi est un visuel, un sensible. Il s’explique crayon à la main : voici donc des schémas et un profil de Sushi, restitués par le GAP ESC (merci Nadia) :

Outil pour amener les jeunes à être confiant et vers le « Bonheur » – Schéma de Sushi

En voici un aperçu :

 

Vous voulez aussi voir Sushi dans des battles de breakdance, à ses débuts en 2009, et dans ses exploits d’urban crew en 2008 ? Voila de quoi motiver des élèves :

Sushi (torse nu) en demi-finale par équipe

Sushi (torse nu) en finale par équipe

Sushi (en jaune, à gauche) en finale individuelle

Urban crew par Sushi

  1. Merci à Sushi pour son témoignage de mars 2017.

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